mardi 24 novembre 2009

Dossier spécial : les Artisans

Par Martine Warck. Portraits par Aurélie Choiral.

Les artisans, ces maitres du savoir-faire de qualité… On les oublierait presque, à force de courir dans les grandes enseignes pour faire nos courses pour parer au plus pressé. Et pourtant, notre quartier offre de belles alternatives à qui sait les saisir… Alors, nous l'avons pris ce temps, pour nous perdre et partir à la découverte de ces artisans qui remplissent de vie une rue, voire le quartier et plus encore… Nous perdre pour se remémorer l'authentique, le beau et le bon…Retomber sous le charme. Et écouter ces personnes nous parler de leur passion. Ils se sont confiés sur ce choix de vie dont ils sont fiers mais qui n'est pas tous les jours facile à vivre, faute de reconnaissance suffisante des pouvoirs publics, notamment. Que cela concerne l'accès à la profession, la protection du métier, le coût exorbitant de la main d'œuvre ou le manque de valorisation de l'enseignement manuel auprès des jeunes avec pour conséquence un réel manque d'attrait pour le métier d'artisan. Malgré ces obstacles, tous se sont débrouillés pour réaliser leur rêve. Que ce dernier fût spontané ou mûrement réfléchi, aucune des personnes rencontrées n’a de regrets. Aujourd'hui, ils n'ont d'autres souhaits que de voir d'autres corps de métier s’installer dans le quartier car la demande est importante. Cela peut sembler paradoxal en ces temps de crise mais le service de qualité a la cote et cela ne semble pas prêt de s'arrêter. Or, avec sa population éclectique et cosmopolite, le quartier du Châtelain et alentours dispose d'un réel potentiel. Avis aux audacieux... Pour ce dossier, nous avons rencontré huit personnalités atypiques qui se sont présentées à travers leur artisanat. De très belles rencontres - merci à tous - que nous partageons aujourd'hui avec vous pour vous donner l'envie de leur rendre visite si ce n'est déjà fait. Bonne (re-)découverte !


MAISON LIENART 11 rue Washington T. 02/648 93 30





Amateurs de gallinacés, précipitez-vous ! Ouverte en 1978 par les époux Liénart, la Maison éponyme est passée maître dans l'art de la volaille. Tandis que Jean-Claude officie en cuisine, son épouse, la charmante Marilène accueille, conseille et propose une variété de mets de qualité faits maison. Parmi les plus connus : le poulet rôti bio, le hachis Parmentier, le pain de viande, les saucisses chipolatas, les cornets et les hamburgers de poulet qui font la joie des grands et des petits. Pour ces derniers, c'est tous les jours la fête, Mariléne leur réserve en effet un accueil digne de ce nom. Notez que les mardis et jeudis, la Maison vous propose son fameux stoemp. On mentionnera également le gibier servi en saison. Et ce n'est pas tout : vous y trouverez tous les jours des salades pour sandwiches, du vol-au-vent, des purées, des potages de légumes saisonniers et une sélection exclusive de charcuterie et pâtés. Envie d'un dessert ? Laissez-vous tenter par le tiramisu de Christelle ou la mousse au chocolat de Thierry, les deux enfants du couple qui ont rejoint l'entreprise familiale. Les amateurs de bons fromages s'arrêteront devant le large choix de produits de terroir dont le mythique Vieux Présent, «qu'on ne trouve plus qu’ici», souligne Marilène avec fierté. Sans oublier la spécialité maison : le fromage blanc à la ciboulette. Un pur régal ! Nec plus ultra : l'enseigne a sélectionné de très bons vins à prix raisonnables pour accompagner ces mets délicieux. Quand on vous disait de vous précipiter…


FRAMING 150 rue Washington T. 02/648 05 93





Historien de formation, Stéphane Aksakow est avant tout un amoureux des belles choses et du travail fait main. C'est en 2003 qu'un heureux hasard lui permet de reprendre cet atelier d'encadrements tenu alors par André Iovlev, d'origine russe comme lui. Le maître lui transmet alors son savoir ou comment travailler le bois, ce matériau noble naturel, dans la plus pure tradition du métier. Du bois, du bois et encore du bois ! Vous vous en rendrez compte dès la porte de l'atelier franchie : partout sur les murs, des cadres aux formes et teintes diverses en chêne, merisier, pin, etc. Si l'atelier demeure pour les clients fidèles, Stéphane diversifie aujourd'hui ses activités, en dédiant une partie de sa boutique-atelier à la création d'une galerie d'art. Y sont exposés et proposés à la vente des paysages animaliers réalisés par des artistes belges et étrangers. « Un vieux rêve enfin réalisé », souligne le maître des lieux. Il propose une collection éclectique dans laquelle vous trouverez certainement l'objet rare. Et qui dit toile, pense aussitôt cadre... Il ne vous faudra donc pas chercher longtemps pour dénicher celui qui mettra le mieux en valeur votre nouvel achat. Framing, c'est aussi un accueil chaleureux et personnalisé, des conseils avisés et un service de qualité. A visiter...




CATLEYA 118 avenue Louis Lepoutre T. 02/344 63 64





Rien que le nom poétique de ce fleuriste nous donne envie... Saviez-vous que «Cattleya» avec deux «t» était le nom de l'orchidée préférée de notre Reine Elisabeth ou mieux, que «faire des catleyas» pour Marcel Proust (avec un «t» cette fois) signifiait faire des câlins? On ne pourrait faire plus romantique... Et tel est bien l'esprit de cette boutique où se succèdent des vases remplis de fleurs de saison sauvages ou raffinées mais toujours belles... Et puis, toutes ces couleurs... Il faut aussi y aller pour faire la connaissance de Brigitte, la patronne un brin rock'n roll et de son équipe fort sympathique sans oublier Gina, fidèle gardienne à poils et quatre pattes de ce bazar floral. De sa boutique, Brigitte affirme que "c'est le seul magasin qu'elle aurait fait". Et elle a bien eu raison de le faire, c'était en 1987 et pour elle, c'est comme si c'était hier. Une idée un peu folle, un heureux hasard qui lui permet de dégotter cet espace avec un ami... Il n'en fallut pas plus pour se lancer. Son leitmotiv: «Du beau achetable.» Et c'est vrai, on peut déjà avoir un très beau bouquet pour dix euros. Catleya se veut la boutique de tous les budgets en misant sur la qualité et le choix. Mais ce n'est pas tout. « Etre fleuriste, nous confie Brigitte, c'est un métier qui laisse la part belle aux émotions. Il y a cette idée qu'on fait partie de la vie des clients. Naissances, anniversaires, mariages et autres moments marquants...tout se passe chez le fleuriste». Et c'est vrai, les clients adultes sont les enfants d'hier et ainsi de suite...Parmi sa clientèle, la boutique peut compter jusqu'à quatre générations d'une même famille ! Alors que ce soit pour garnir une boutonnière ou offrir un bouquet à l'être aimé, que votre portefeuille soit bien ou moins bien garni, que vous soyez bobo chic ou rebelle, allez-y !




JOHN FRAGA 64 rue Darwin T. 02/345 35 06





John, l'artisan-coiffeur devenu coiffeur de stars, coqueluche de son quartier et bien au-delà...Quand on lui parle de sa renommée, il sourit timidement et pourtant, son espace aux lignes sobres ne désemplit pas. Et cela fait maintenant six ans que ça dure. Ses débuts comme coiffeur-studio pour les chaînes tv l'amènent à voyager aux quatre coins d'Europe. De cette expérience, il ne prend que le meilleur en se différenciant, comme il aime à le rappeler, pour attirer une clientèle désireuse d'autre chose, d'une certaine qualité... C'est ainsi que John travaille avec différentes gammes de soins capillaires dits naturels, c'est-à-dire sans éléments toxiques. « De plus en plus de gens se plaignent de l'hypersensibilité de leur cuir chevelu, voire d'allergies », explique-t-il. Et de traiter vos cheveux avec des produits «écolo » (sans ammoniaque pour les colorants) ou carrément bio : shampoings hydratants, crèmes colorantes, conditionneurs, huiles de soin et masques revitalisants... Le choix est large. On vous recommande particulièrement le produit-phare de la maison : le «Soin Spa en quatre phases»… Détente garantie. Qui vient chez John Fraga, vous demandez-vous? Eh bien tout le monde et de partout, grâce au bouche-à-oreilles. Hommes et femmes de toute origine ou condition, anonymes et célébrités, jeunes et moins jeunes... «Toutes les classes sociales, de 7 à 77 ans, viennent chez nous», résume John. Le mot d'ordre du salon pourrait être «liberté». Les gens viennent avec leurs idées ou laissent carte blanche à John, son bras droit Antonio et leurs trois assistants pour trouver le meilleur look. Eh oui, parce qu'il est aussi question ici de relooking en prodiguant les conseils avisés qui vous feront paraître sous votre meilleur jour ! On profitera de cette séance cocooning pour admirer les œuvres exposées dans le salon, des coups de cœur «coup de pouce» de John pour d'autres artisans à qui l'on souhaite le même succès. S'y rendre avec ou sans rendez-vous.




KOCA &Co Atelier 129 rue Franz Merjay T. 02/345 77 67





Avant d'y entrer, arrêtez-vous devant la vitrine élégamment décorée des mobiles de l'artiste Côme, entre autres choses… Captivante. Il y a ensuite les fous rires qui fusent de l'intérieur... La tentation de rentrer dans ce petit atelier est trop grande. Aussitôt dit, aussitôt fait. Une fois le seuil franchi, Claire et Diane vous accueillent chaleureusement. Deux acolytes mais surtout deux amies qui se sont lancées en 2003 sur un coup de tête. Des envies de création, de réunir leurs talents respectifs dans un même lieu, un heureux hasard (encore un!) qui leur fait découvrir l'endroit et c'est ainsi que naît "Koca & Co", contraction de leurs deux noms de famille, Kollia pour Diane et Cattier pour Claire. Diane adore les étoffes anciennes et les tissus, surtout les imprimés. Tentures, rideaux, nappes, coussins ou plaids, ses doigts d'or peuvent tout réaliser...Son œil avisé lui permet de sélectionner les bons basiques, de très beaux tissus, quasi uniques car réalisés à la main (!). Elle définirait sa palette comme chic mais avec un brin de douce folie... « Les gens ont besoin de rire, de fantaisies, de penser à des choses positives ». Sus au gris, vive les imprimés ! Et nous de contempler avec ravissement des fleurs anglaises et des imprimés ethniques ou de toucher des étoffes plus douces que de la soie... De son côté, Claire n'est pas en reste. Elle réalise des abat-jours en tirage très limité et des suspensions sur mesure exclusivement, du plus sobre au plus sophistiqué. Vous ne savez plus que faire de vos vieux pieds de lampe ? Apportez-les à la boutique, il se pourrait bien qu'ils y retrouvent une seconde vie. Cela vaut pour d'autres objets de déco, même les plus insolites. On est bel et bien en pleine ère vintage. Quand recycler devient tendance ... Un thème important pour les deux amies, autant que le bio et l'éco-friendly (de plus en plus de tissus sont certifiés), l'éthique (la provenance des tissus est un critère majeur de sélection) et le respect du métier, «on s'emploie à faire travailler les petits artisans», expliquent-elles. Une philosophie qui leur vaut un succès sans cesse croissant, pratiquement sans publicité. «Ce sont les gens qui nous trouvent», concluent-elles. Pour leur laisser la concentration nécessaire, l'atelier n'ouvre d'ailleurs que deux jours par semaine ou sur rendez-vous. Une précieuse adresse à conserver...


LE TYPOGRAPHE 67 rue Américaine T. 02/345 16 76



Pour la petite histoire, l'interview s'est déroulée dans l'atelier où Cédric, le typographe, reçoit sur rendez-vous et c'est là que l'expression «se sentir comme un éléphant dans un magasin de porcelaines» a pris tout son sens... Il y a d'abord les authentiques imprimantes Heildeberg, témoignages imposants du siècle passé et leur ronronnement qui n'est pas sans rappeler celui des vieilles locomotives. Et puis, ces tout fins tiroirs où sont triés et conservés précieusement des milliers de casses en plomb correspondant à autant de polices de caractère. Sur les étagères, des interlignes en plomb également, de toutes dimensions et des catalogues de papiers dont celui ancestral de la Maison Gmund, proposé en collection complète. Enfin, il y a Cédric, le jeune typographe qui vous parle «typo», compte en points et ne peut s'empêcher de mesurer les interlignes sur tous vos documents. Un personnage tellement amoureux de son métier qu'il pourrait vous en parler des heures entières s'il en avait le temps et - pourquoi pas - vous convaincre de laisser tomber votre Macbook dernier cri pour retourner à la base, à la matière, au toucher. «L'avantage dans la typo, explique Cédric, c'est qu'on est contraint par une technique. On imprime avec une matière alors que l'aspect papier ne compte plus quand on travaille avec les nouvelles technologies. C'est cette logique typographique et ses limites qui nous obligent à être encore plus créatifs».


A noter, le lancement prochain d'un papier à lettres à motifs animaliers qui sera également vendu chez Boucle d'or (12 rue du Tabellion). On parie que, comme déjà pas mal de sociétés et de particuliers, vous ne jurerez bientôt plus que par cette adresse pour vos faire-part et cartes de visites ! Dernière minute: une journée «Portes ouvertes à l'atelier» sera organisée cet automne. Prenez vos renseignements à la boutique.


LA CORDONNERIE 84 rue de l'Aqueduc T. 02/537 53 94





Il s’agit probablement d’une des plus vieilles enseignes du quartier. La Cordonnerie existe en effet depuis 1894 ! A l’origine, elle était située place du Châtelain, dans l’actuel espace «à emporter» du restaurant Basta Cosi. Elle bougera ensuite rue de l’Aqueduc après sa reprise en 1947 par la famille Van Campenhoudt. Plusieurs générations s’y sont succédées et aujourd’hui c’est Luc, le patriarche, qui dirige l’atelier, assisté de Rudy et de François, son beau-fils. On retrouve son épouse Monique et sa fille Sophie à la maroquinerie, située en sous-sol. Sans oublier le petit-fils Thibault, âgé de 4 ans qui s’essaie déjà à la cordonnerie quand il ne joue pas avec sa sœur Lola (2 ans) dans le domicile familial, situé à l’étage. Une affaire de famille, donc. «C’est super gai de travailler en famille, chacun a son propre univers à développer. Au final, on se complète bien», explique Sophie. «C’est une situation idéale, confirme Luc, surtout pour la transmission du savoir comme il n’existe plus d’écolage officiel». Au rez-de-chaussée, se situe l’atelier de cordonnerie où l’on répare, polît, élargit ou rétrécit chaussures et bottes. Les maisons de prêt-à-porter viennent également y faire recouvrir leurs escarpins et sandales pour des mariages ou de prestigieux dîners. Au sous-sol, c’est une autre musique. Monique et Sophie s’occupent exclusivement de maroquinerie : entretien, réparation et aussi confection de ceintures et sacs à la demande. Diplômée en stylisme, Sophie développe en parallèle sa propre ligne. Tous s’emploient à fournir un service de très grande qualité. Certes, celle-ci a un prix mais comme le rappelle très justement Luc, « faire réparer sa paire de chaussures coûtera toujours moins cher que d’en acheter une nouvelle ». C’est qu’il pense aussi au développement durable. L’atelier n’hésitera cependant pas à vous recommander un service express s’il s’agit de réparations superficielles. Ce qui ajoute encore à leur renommée amplement méritée…


FRAMBOISIER DORE 35 rue du Bailli T. 02/647 51 44





On ne pouvait terminer cet article qu’avec un dessert… Et quel dessert ! Dans ce salon-boutique du goût, se côtoient plus de trois cents saveurs de glaces et sorbets crées par Yves, le maître des lieux, dans son atelier, situé en sous-sol. S’il s’est formé à l’école du CERIA en pâtisserie/glacerie, Yves a surtout un palais très développé à la base. En conciliant ce don avec son amour pour la nature, il s’est mis à composer des saveurs d’une qualité exquise. A voir la file qui se presse avec ravissement au comptoir, été comme hiver, on devine de nombreux conquis… Glace aux noix du Périgord, sorbet aux cerises, glace au spéculoos… Il y en a pour tous les goûts. Deux mots d’ordre : créativité et qualité. Peu importe les heures passées à l’atelier pour créer ces parfums tels le nez composant ses fragrances. «Ce qui me rend heureux, c’est de voir que les gens le sont aussi grâce à mes produits. Quand on déguste un met de qualité, on se sent tellement bien, relax, heureux quoi ! », explique Yves. Ici, point de place pour les colorants et autres conservateurs chimiques : tout est naturel. Une aubaine pour les gens allergiques, de plus en plus nombreux, semble-t-il. L’artisan reconnaît cependant qu’il doit aller chercher de plus en plus loin, et souvent hors de nos frontières, pour trouver des basiques - œufs, sucre, lait, fruits, fleurs, liqueurs, épices, etc. - qui ont du goût. «Et c’est bien là qu’est tout le problème», résume Yves. L’homme ne désespère pas de voir les choses bouger dans le bon sens, avec la tendance verte mais là encore, attention aux abus possibles. Son rêve ? «Un label de qualité pour les artisans-glaciers ». Espérons que ce vœu soit entendu, c’est tout ce qu’on lui souhaite. Framboisier doré, c’est aussi un salon de dégustation où sont proposées toute l’année crêpes, gaufres et tartes chaudes faites maison. Rien que du bon. Bon appétit !

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